Bras en l'air, un crayon en main, il tourna sur lui-même ; tourne tourne tourne – allez, plus vite, mieux, tourne à en perdre la voix – tourne, tourne. Ses jambes commençaient à lui faire mal d'avoir trop dansé, trop bougé, et ses oreilles percées par la musique qui déboulait à fond des écouteurs – mais tourne, Billy, tourne je t'en supplie. Il ne pouvait juste plus s'arrêter. La musique lui chantait la vérité, le crayon en main qu'il ne voulait pas lâcher ; ça faisait tellement mal. Il avait cru qu'il ne pourrait plus jamais remarcher.
L'hôpital l'avait relâché.
Attaqué par un taré. Pauvre garçon. Dix-neuf ans seulement...
Il aurait pu y rester.

Alors tourne, tourne.

La lune est si belle, ce soir.

Je vous en prie, ne déchirez plus les étoiles.

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Une vie normale. Rien à raconter. Rien à dire. Passé sans trop de tâches. Déménagement au Japon l'année de ses six ans pour le travail de son père ; de meilleures opportunités de carrières pour lui là-bas, puisqu'il parlait excellemment bien la langue – un ancêtre japonais lui aurait soit-disant passé l'amour du pays du soleil levant. Mère partie quelques mois seulement après parce qu'il n'arrivait pas à monter en grade comme il l'aurait voulu. L'argent a commencé à rentrer dans les caisses peu après. Triste pour maman. Tant mieux pour Billy.
Et puis il y a plus d'argent, encore plus d'argent. Aucun problème à l'école, aucun problème d'adaptation. Puis l'adolescence est arrivée. Il y a eu la drogue, les petites amies, les petits copains, les tests, les erreurs. La drogue, la drogue. L'alcool. Les relations non protégées, les risques qui grimpent, la tête qui tourne à l'en faire vomir plus qu'il ne le faisait déjà tous les soirs.
Jusqu'à ce que la situation financière tombe. Chute. Se casse la figure royalement. Qu'il ne doive trouver des petits boulots ici et là pour combler leurs dettes comme il pouvait et aider son père à vivre plus correctement. Puis il a commencé à accepter tout ce qu'on lui donnait – et s'il a refusé de passer de la drogue, c'est uniquement parce qu'il ne voulait pas attirer d'ennuis à son paternel. Un peu d'argent ici ou là, qu'il ramenait sans jamais dire pourquoi. On ne lui demandait pas non plus. Il était déjà cassé de partout, sans amour propre ni rien du tout.
Alors il a haussé les épaules au poste de police, haussé les épaules à l'hôpital. Non, je ne le connaissais pas. Menteur. Non, ce n'était pas une agression personnelle. Menteur, menteur. Non, je ne me prostitue pas.

… Comme tu mens, tu vois.

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Allez, Billy, tourne sur toi-même et oublie. Tourne tourne tourne – tu as vu comme c'est joli ? Yeux rivés sur les étoiles comme autant de pierres précieuses filant autour de lui, il éclata d'un rire sans joie. Les larmes se mirent à couler ; il tomba. Dos contre l'herbe, crayon en main, il traça des vœux imaginaires dans le ciel.
Je vous en prie, je veux m'en sortir et aller mieux.
J'ai juste pas la force, vous voyez ?
Lui qui était tout juste bon à écrire, comment aurait-il pu faire quoi que ce soit de sa vie. Il avait tout fichu en l'air des années auparavant. Même la décision de son père de l'envoyer à Hoshikami après l'agression n'avait rien changé ; il étudiait à peine, buvait un peu, dormait beaucoup. Il n'avait plus que ses prières à adresser aux étoiles ; s'il y croyait, l'une d'elle descendrait forcément l'aider. Forcément. Il n'était pas ici pour rien après tout.

Puisqu'aujourd'hui, il n'avait plus que ses prières pour lui.